A ceux qui nous disaient, "à quoi bon se battre, dans une commission d'enquête les dés sont pipés !" nous pouvons répondre : "heureusement nous avons été là !"
A ceux qui nous disaient , "vous êtes des incompétent" nous pouvons répondre que nos arguments ont portés.
A ceux qui nous disaient "vous êtes des passéistes" nous pouvons répondre qu'il en faudrait beaucoup des passéistes comme nous pour défendre le rail !
A ceux qui nous disaient "vous ne pouvez rien face aux grands décideurs" nous pouvons leur dire qu'en effet les résultats de la commissions peuvent ne pas être suivis d'effets mais nous allons les faire connaître et les élus finiront pas plier, plus devant la pression citoyenne que devant des recours.
A ceux qui nous disaient "…
Mais laissons dire et continuons notre combat. En étudiant le rapport de 500 pages de la commission. Petit à petit je vais en donner honnêtement les conclusions et d'abord ci-dessous la conclusion générale.
1 ) La métropolisation
Bel exemple qui démontre que le dossier LGV n'est pas seulement technique mais politique. Les autorités ne rêvent que métropoles or les habitants rêvent de périphérie. La question qui est posée est celle de l'équilibre plus que celle de la concentration.
2 ) Les alternatives ?
Merci à la commission d'avoir entendu nos revendications sur ce point crucial. Alors qu'elle n'avait pas forcément à s'y pencher. Nous pouvons le répéter avec son appui : "Pas de supériorité incontestable de la LGV si on intègre les gains de temps, les coûts et les services rendus." Et cette phrase à laquelle je suis tant attachée :
"Le temps moyen de la liaison Paris-Toulouse est contestable, dans la mesure où il s’appuie sur des temps d’arrêts intermédiaires irréalistes."
3 ) Les finances ?
Là aussi la commission a répété qu'elle n'avait pas à se prononcer sur le sujet mais elle a accepté de pointer que le financement de Tours-Bordeaux n'étant pas respecté comme imaginer la suite pour Bordeaux-Toulouse.
Mais laissons les commentaires, goûtez aux conclusions directement. JPD
6 Conclusion générale
61 Les aspects positifs du projet
Le gain de temps sur la liaison à grande vitesse Bordeaux-Toulouse, est important, mais cet avantage n’intéresse qu’une population qui privilégie la vitesse plutôt que le prix du billet.
La desserte de Mont-de-Marsan est améliorée et le gain de temps vers Bordeaux est sensible, cependant le nombre d’arrêts sera conditionné par la rentabilité économique calculée par le transporteur.
Le projet crée une liaison Sud-Sud qui améliore réellement la relation Toulouse-Dax et au-delà, mais le trafic prévisionnel est faible.
La liaison sur ligne existante Bordeaux-Facture et au-delà est améliorée. Le trafic TER, TET et fret est moins contraint entre Bordeaux et Dax. Le projet peut générer des retombées économiques qui favoriseront essentiellement les deux grandes métropoles.
Le chantier nécessite un nombre d’emplois directs et indirects conséquent, contribue à développer la qualification de la main d’œuvre et à maintenir l’activité des entreprises de travaux publics.
Le projet contribue au report modal de la route vers la voie ferrée sous réserve des effets de la concurrence d’autres modes de transport plus économiques pour l’usager (covoiturage, autocars, avions low-cost).
Le bilan carbone est modestement positif avec un temps de retour qui se situera au-delà de 10 ans mais n’intègre pas tous les transferts de matériaux.
Le projet est soutenu par les élus des grandes collectivités, les chambres de commerce et d’industrie et les entreprises non implantées sur le tracé.
62 Les insuffisances et faiblesses du projet mis à l’enquête
621 Certains impacts insuffisamment pris en compte
Le besoin net en matériaux, qui se chiffre à plusieurs millions de mètres-cube, est considérable. Or, la gestion de la ressource, les lieux de prélèvement et de dépôt et les nuisances générées par les transports ne sont pas précisément définis et analysés.
Les compensations, en particulier pour les sylviculteurs et les viticulteurs seront difficiles à trouver. Les risques de déclassement et d’atteinte aux cultures sensibles (appellations, Bio, semences, etc.) sont insuffisamment pris en compte.
Les pertes par destruction directe de la faune et de la flore, dues au chantier et qui pourraient compromettre la capacité ultérieure de reconstitution, ne sont pas analysées.
La coupure que constitue le tracé (lignes, raccordements, triangle ferroviaire) conduit à une perturbation profonde des habitudes de déplacement, de l’exploitation des terres, du paysage et des continuités écologiques dans des zones agréables où la population est attachée à un certain art de vivre. Cette perturbation n’est pas compensable.
Même si le tracé résulte d’un choix décrit comme concerté, toutes les conséquences de la création d’un triangle ferroviaire en Sud-Gironde, dans un secteur fragile déjà durement touché par d’autres infrastructures, n’ont pas été suffisamment analysées.
622 Un besoin non partagé
L’enquête a connu une forte mobilisation des particuliers mais les différentes composantes de la société étaient également représentées, en particulier les syndicats professionnels, les associations et les collectivités locales. Aucune catégorie, même les entreprises, n’est majoritairement favorable au projet. Les communes rurales sont très opposées dans la partie Nord du tracé, plutôt résignées au Sud. Au regard de l’enjeu, la commission aurait pu s’attendre à une plus forte mobilisation des soutiens au projet. Au final, la commission n’a pas décelé l’expression d’un véritable besoin de lignes à grande vitesse dans le Sud-ouest.
623 Une infrastructure lourde pour un service non garanti
Si le coût du projet, en ligne avec celui de la liaison Tours-Bordeaux, est connu, le service rendu aux usagers sur ces lignes, ne peut être garanti par le maître d’ouvrage et sera défini par la SNCF selon des critères de rentabilité qui lui sont propres.
Le service régional à grande vitesse (SRGV) va conduire à des dépenses lourdes de fonctionnement et d’investissement pour la région Aquitaine. Ensuite, l’intérêt de la halte SRGV Sud-Gironde d’Escaudes (33) n’apparaît pas à la commission. La fréquentation prévisionnelle est très faible et son implantation dans une zone de densité démographique faible n’est pas de nature à présenter un intérêt pour les transports du quotidien. Enfin, le SRGV risque d’entraîner un transfert progressif du service ferroviaire sur LGV, de l’opérateur historique vers la région Aquitaine, pour la desserte des villes moyennes (Mont-de-Marsan, Dax et au-delà) augmentant d’autant les dépenses de l’autorité organisatrice des transports.
624 Une métropolisation au détriment des villes moyennes et des zones rurales
L’objectif affiché et assumé de la grande vitesse est de relier sans arrêts, des grandes métropoles. En conséquence, le développement économique se concentrera autour des gares des deux métropoles et drainera l’emploi au détriment du développement local.
La ligne nouvelle Bordeaux-Toulouse va assécher partiellement la ligne POLT. La baisse de fréquentation et le déficit d’exploitation qui s’ensuivra aura des conséquences sur la desserte des villes moyennes proches et sur les économies locales.
625 Des alternatives à la grande vitesse insuffisamment explorées
L’exploration par la commission, de l’aménagement de la ligne existante entre Bordeaux et Toulouse n’aboutit pas à une supériorité incontestable du projet de lignes nouvelles, si on intègre les gains de temps, les coûts et les services rendus. La commission estime que l’évaluation et la prise en compte par le maître d’ouvrage de certains éléments de coût sont contestables (terrassements, réduction des shunts, élimination des passages à niveau).
L’objectif « drapeau » du projet, un gain de temps de 1h sur Bordeaux-Toulouse et d’environ 3 heures sur Paris-Toulouse, ne concerne qu’une minorité des trains sur ce trajet. Le temps moyen de la liaison Paris-Toulouse est contestable, dans la mesure où il s’appuie sur des temps d’arrêts intermédiaires irréalistes.
626 Un financement public incertain
De nombreuses collectivités territoriales ne respectent déjà pas leurs engagements pour le financement de la LGV Tours-Bordeaux. Compte tenu de la réduction de la dotation de l’Etat aux régions, de la remise en cause de la clause de compétence générale, la confiance dans ce type de financement pour le GPSO/LN est largement entamée.
627 Une rentabilité socio-économique insuffisante
La rentabilité socio-économique est insuffisante. La valeur des indicateurs VAN et TRI présentée dans le dossier pour le projet GPSO/LN est à peine positive. La méthode d’évaluation des indicateurs de rentabilité est contestée (CGI, Rapport Quinet, SNCF).
L’augmentation du prix du billet pour financer la vitesse est certaine. En fonction de son niveau, cette augmentation aura des conséquences directes sur la fréquentation, rendant encore plus incertaine la rentabilité socio-économique.
628 Un découpage et un phasage du projet regrettables
La ligne nouvelle entre Bordeaux et Toulouse est subordonnée à la réalisation des aménagements au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse, sinon le service des trains du quotidien autour de ces deux métropoles pâtirait de la priorité donnée aux liaisons grande distance.
La rentabilité socio-économique de la seule liaison Bordeaux-Dax n’est pas assurée. Sa justification par la perspective d’une prolongation vers l’Espagne n’est pas recevable. La rentabilité juste acceptable de l’ensemble du projet « lignes nouvelles » résulte du regroupement de deux branches aux enjeux et objectifs très différents.