Après Sud-ouest, La Dépêche rend compte de la lettre des associations au Conseil d’Etat au sujet du plan de financement. J-P Damaggio
La Dépêche Publié le 16/02/2022 à 07:01
Jamais le projet de LGV entre Toulouse et Bordeaux n'a semblé aussi proche d'être concrétisé. Le Premier ministre Jean Castex, de passage dans le Gers ce lundi 14 février, a même annoncé le lancement des travaux en 2024. Mais les opposants au projet comptent bien mettre leurs dernières forces dans la bataille.
Sommes-nous à la fin d'un feuilleton qui aura duré plus de 20 ans dans la région ? Celui du projet de LGV reliant Toulouse à Bordeaux ? L'hypothèse est plus que probable alors que le Conseil d'État doit commencer à étudier le dossier de financement de la construction des lignes Toulouse-Bordeaux et Bordeaux-Dax, marquant l'entrée dans ce qui pourrait être la dernière ligne droite de ce vaste plan pour la mobilité régionale dans le sud-ouest.
Le financement est-il bouclé ?
Ce mardi 15 février était présenté comme la date-butoir pour obtenir l'engagement de toutes les collectivités censées mettre la main à la pâte dans le financement du projet de LGV. Et pour cause, c'est désormais au tour du Conseil d'État d'étudier le dossier du GPSO (Grand Projet du Sud Ouest) pour lequel les financements doivent être répartis à 40% pour les collectivités, 40% pour l'État, et 20% pour l'Union européenne.
Problème, jusqu'à présent, le Département du Lot-et-Garonne a toujours refusé d'engager les finances départementales dans le projet, au même titre que d'autres collectivités sur la partie Bordeaux-Dax (les communautés d'agglomération Pays basque et du Grand Dax), forçant le président de la Région Nouvelle-Aquitaine, Alain Rousset, à augmenter la part de sa collectivité dans le projet. Un investissement supplémentaire de 226,5 millions d'euros que la Région a consenti dans la mesure où il pourra être remboursé grâce au reversement des recettes que va empocher SNCF Réseau, dont le Lot-et-Garonne, par exemple, sera privé.
Tous les feux semblent donc au vert s'agissant du financement dont l'étude par le Conseil d'État ne représenterait qu'une simple "formalité", selon Jean-Louis Chauzy, le président du Conseil économique et social d'Occitanie.
Un retournement de situation est-il possible ?
Certains sont prêts à y croire en tout cas. C'est le cas de plusieurs associations environnementales qui ont fait passer au Conseil d'État un courrier en ce début de semaine. Outre leurs craintes quant à l'impact écologique d'un tel projet, elles y listent une série de points qui devraient selon elle alerter le Conseil d'État quant à la régularité du plan de financement. L'investissement supplémentaire de dernière minute consenti par la Région Nouvelle-Aquitaine en fait notamment partie.
"À part un petit cercle réuni autour du président de Région, les élus ont dû se prononcer sur un dossier dont ils ont pris connaissance seulement la veille. C’est une violation des conditions légales d’information des élus. Cette délibération doit être annulée", a affirmé lundi 14 février lors d'une conférence de presse Denis Teisseire, fondateur de l’association Trans’CUB, connue notamment pour avoir empêché le projet de métro bordelais de voir le jour.
Les opposants évoquent également un financement de l'Europe loin d'être aussi évident que l'assurent les partisans du projet : "La Commission européenne a annoncé le 16 septembre dernier que l’enveloppe 2021-2027 pour tous les projets ferroviaires des 27 pays serait d’1,87 milliard d’euros", affirme Denis Teisseire. Soit une enveloppe inférieure à ce qu'il faudrait uniquement pour le GPSO, à savoir 2,8 milliards d’euros. "Il faut qu'ils partent vite en formation puisque l'Europe a classé Bordeaux-Toulouse dans les grands corridors européens, ce qui nous ouvre droit au financement des mécanismes d'interconnexion européenne dans un budget de 20 milliards d'euros", a répondu du tac-au-tac Jean-Louis Chauzy ce mardi 15 février. Fin du débat ?
À quand le début des travaux ?
Si le Conseil d'État valide le dossier de financement et sauf éventuel retard, le Premier ministre Jean Castex a annoncé ce lundi 14 février que les travaux de construction devraient démarrer au début de l'année 2024, pour une inauguration de la ligne à l'horizon 2030. Utopique ? Pas du tout, toujours d'après Jean-Louis Chauzy. "Pour la ligne Tours-Bordeaux par exemple, l'inauguration a été célébrée cinq ans après son annonce, le 1er juillet 2017".
Il reste pourtant beaucoup de chemin à parcourir après l'éventuelle décision positive du Conseil d'État. Il passera notamment par la création d'une Société publique locale (SPL) qui réunira tous les financeurs ainsi que SNCF Réseau. Les mois qui suivront doivent permettre de lancer tous les appels à projet nécessaires pour attribuer les différents travaux à effectuer pour ce qui s'annonce être un chantier gigantesque, avec environ 350 kilomètres de voies ferrées à construire : 220 kilomètres entre Bordeaux et Toulouse, 160 entre Bordeaux et Dax, dont 55 kilomètres de tronc commun. Trois nouvelles gares, à Agen, Montauban et Mont-de-Marsan, doivent par ailleurs sortir de terre.
Lucas Serdic