Comme indiqué, plusieurs associations ont organisé au Sénéchal à Toulouse, une table-ronde autour du ferroviaire qui a démontré à la fois l'attachement es participants au train et des inquiétudes diverses.
Les exposés recoupant ce qui a déjà été écrit si souvent sur ce blog je vais rendre compte des questions qui pour l'essentiel ont porté sur la LGV.
SNCF : Sabotage National du Chemin de Fer
Dans l'exposé déjà, Henri Célié, avait clairement expliqué que "la SNCF n'existe plus", à cause d'une logique financière mise en avant, au détriment d'une logique de service public. Côté usagers le participant donnant un exemple a donc réduit la Société à Sabotage. Comme tous les autres points la question mérite débat quand par ailleurs d'autres présents rêvent encore d'une lutte pour une SNCF service public.
L'argumentation pour l'alternative ?
C'est avec intérêt que j'ai noté plusieurs intervenants peu au fait de l'alternative, voire craignant même que nous manquions d'argument. Car dire et répéter comme ce fut la cas à la tribune que les commissaires enquêteurs ont dit NON n'est pas suffisant. Peut-être parce que nous les avons (ou d'autres) achetés pour dire non ? Si nous les avons "achetés" c'est avec des arguments qu'en face RFF n'a pas été capable de ridiculiser.
Pourquoi, nous les opposants, n'avons-nous pas été capables d'utiliser largement ce non exceptionnel ? Ou de l'expliquer ?
Dans cette affaire, RFF a cru que sa propagande suffirait à convaincre les commissaires comme elle a convaincu les grands élus donc ils se sont contentés de raconter leurs salades (avec tout le respect dû aux salades).
Je prends un exemple : "3 h 10 Paris-Toulouse". Voilà la propagande.
Nous avons argumenté sur ce mensonge. Les commissaires ont demandé des réponses sur le temps moyen et RFF a toujours pris la tangente… Nous avons dit dès 2010 : "3 h 10 c'est pour l'unique train direct" et on nous a pris pour des pignoufs. "Au moins un arrêt à Bordeaux !" Puis RFF a reconnu que 3 h 10 c'était le temps le plus exceptionnel pour un aller-retour avec peut-être un train en plus. C'est vrai aussi pour l'avion : "avec ou sans arrêt, avec ou sans escale ?"
En avion Toulouse-Paris n'aura jamais d'escale et il faudrait que pour le train ce soit pareil ? Alors qu'un train qui est un vrai train c'est fait aussi pour le cabotage, pour aller de Toulouse à Tours ou de Toulouse à Limoges. Mais bref, je ne vais pas refaire le débat !
La propagande et le clientélisme
François Simon l'a noté, il faut réintroduire de la démocratie dans cette affaire. A condition là aussi d'être très sévère sur le constat. Le terme "propagande" n'est pas une exagération. Pourquoi elle passe mieux qu'ailleurs ? Car les citoyens ont confiance en la SNCF dont ils pensent qu'elle existe toujours. Ils aiment le train donc si ont leur dit 3 h 10 c'est que ça doit être vrai ! Henri Célié a expliqué qu'en effet, pour éclairer le citoyen il faudrait présenter les diverses options.
Je vais être encore plus dur : pendant l'EUP à la première réunion, RFF a sorti de derrière les fagots, une étude concernant les lignes existantes démontrant que leur rénovation causerait plus de dégâts que la ligne nouvelle ! Il faut l'avoir vécu pour devenir un révolté contre la SNCF ! On a réussi à obtenir grâce aux commissaires cette "contre-étude" sur les lignes existantes ! Elle propose un contournement de Moissac qui traverse la ville en plein ! Mais là aussi, je l'écris et qui va me croire ?
Se battre pour des arrêts !
Preuve de la folie du système et c'est le bilan de la LGV Tours-Bordeaux : les collectivités qui ont payé pour la ligne doivent à présent payer pour que le train qui traverse leur territoire s'arrête ! En cela l'association caussadaise TEG 82 a été avec d'autres sur la POLT, à l'avant-garde !
Dans la logique financière arrêter un train c'est un coût.
Dans la logique service public arrêter un train c'est un service.
Qu'on le veuille ou non, la concurrence du privé ne se précipite pas sur le train voyageur car le train suppose le service d'abord et le fric après. Mais le rail français étant en passe de devenir juste une question d'argent….
Et l'exemple du POLT est emblématique : son arrêt à Brive une hypothèse ?
Mais non l'idée est abandonnée… Pour combien de trains ? Jusqu'à quand ? La question nous renvoie au sabotage : à Toulouse pour prendre le POLT il faut insister ! Ce n'est pas nous qui opposons les moyens de transport collectif mais la SNCF qui fait la guerre aux intercités pour le profit du TGV. Si certains (ou leurs entreprises) veulent payer cher pour aller à Paris, je ne suis pas contre tant qu'on n'en déduit pas qu'il faut envoyer à la casse tout le circuit intercité !
Là aussi, il suffisait de lire les documents de l'EUP… (pas forcément les 16 000 pages…).
La faillite de l'entreprise du tunnel du Perthus
De la tribune comme de la salle est venu sur le tapis la question de la faillite du groupe financier qui gère le tunnel du Perthus. Sauf quelques féodaux, personne ne peut accéder aux éléments secrets des PPP, or, on s'en doute, les entreprises ne s'engagent pas à la légère et imposent des clauses leur assurant leurs arrières. Les Politiques prétextant faire des économies avec le PPP se retrouvent sur les bras avec des factures à rallonge ! Au risque de déplaire à quelques amis, je ne crains pas de dire qu'une LGV entre Perpignan et Figueres me semble utile pour éviter le temps perdu vu la différence d’écartement des rails en changeant à Cerbère et Port Bou. Je ne dis pas que le trajet choisi était le bon et je ne dis pas que le projet était rentable mais utile et les Etats devaient en assumer la charge. Car ne tombons pas nous aussi dans la logique financière en jugeant seulement de la rentabilité ! Pouvoir faire en train un Toulouse-Barcelone sérieux est une bonne chose. Encore faut-il qu’entre RENFE et la SNCF l’entente soit possible sauf que RENFE est encore un service public et la SNCF non, aussi il a fallu attendre un an avant de trouver un accord qui s’est révélé très vite ridicule en matière d’horaires.
Bref, la faillite en question (première LGV en PPP) est l’annonce que d’autres faillites verront le jour car les projets suivent la même pente : sous-évaluation des dépenses et surestimation des gains !
Et le TER ?
Il est soumis aux mêmes contraintes que les autres trains : un TER direct Montauban-Toulouse sera nettement plus rapide que s’il s’arrête cinq fois. Après déjà les autres points évoqués voilà une complication supplémentaire dans le débat quand en plus à Toulouse il faut parfois un ticket Tisseo pour un tronçon puis un ticket SNCF !
La complication est venue du non de l’EUP aussi sur le tronçon Toulouse-St Jory. Il faudrait une réunion sur ce seul thème surtout quand, sans lire les conclusions des commissaires on dénonce leur analyse ! Rappelons que pour cette EUP, les commissaires afin de compléter leur connaissance du dossier ont demandé une prolongation que nous n’avons pas obtenue sur le dossier LGV. Ils n’ont pas fait une déclaration contre le TER mais là aussi un NON contre un projet mal ficelé de RFF. Au moment même de la réunion RFF annonçait des travaux importants sur une autre ligne Tarbes-Toulouse. Henri Célié avait d’ailleurs bien insisté, quant à la nouvelle région, aux différences entre le système Languedocien (côtier et donc linéaire) et le système midi-pyrénéen en étoile autour de Toulouse comme le système français est en étoile autour de Paris. Le TER en Midi-Pyrénées s’est fortement amélioré mais reste loin des besoins et est moindre qu’à Bordeaux.
La métropole
La LGV serait au moins un bon point pour les deux métropoles, Toulouse et Bordeaux : c’est sa fonction. C’est encore là un vaste débat car qui est la métropole ?
En Midi-Pyrénées l’importance de Toulouse ne doit pas faire oublier que 75% de la population vit en dehors de Toulouse ! Mais je ne le dis pas pour opposer Toulouse et le reste de la région!
Car à Toulouse comme partout il y a une population plus portée aux transports du quotidien qu’aux transports grandes lignes. Plus de métro, plus de tram, plus de bus pour la ville c’est aussi une question. Le nom de Matabiau n’a pas été prononcé au cours de la réunion car tout ne pouvait pas être dit. Sur ce point comme sur d’autres la question n’est pas en pour ou contre la rénovation de la gare. Tout investissement pour le rail nous semble une bonne chose et justement, il ne faut pas s’en remettre à l’arlésienne LGV pour améliorer la gare tout en pensant bien sûr à son éventualité.
Le fret
La gare de triage de St Jory non plus n’a pas été évoquée. Bel exemple d’un massacre du rail ! La SNCF n’existe plus quand elle est devenue le premier transporteur routier ! Et continuer les études pour la TCP (Traversée centrale des Pyrénées) est dans ce contexte totalement assassin.
Le cynisme pour finir
J’écris ce compte-rendu de mémoire dont chacun sait qu’elle est sélective, mais je retiens ce témoignage d’Henri Célié : dans une réunion les autorités de la SNCF se sont lamentés car il y avait eu 40 incidents alors que leur prévision c’était seulement 20 ! Tabler sur un objectif d’aucun incident devient totalement irréaliste alors que pour le ferroviaire un incident a des effets en chaîne.
Je ne sais si le terme de cynisme est approprié ; j’en cherche un et d’autres pour qualifier le changement de société dans lequel nous sommes entrés.
Un grand bravo à tous les intervenants de la tribune comme de la salle et aux organisateurs. Et il n’est pas interdit de compléter par des commentaires.
Et j’ajoute les prochains rendez-vous :
- Ce samedi à Gourdon, Etats Généraux de la ligne POLT (malheureuse-ment je ne pourrais y être).
- La réponse du gouvernement concernant la signature de la DUP de la LGV.
- La réponse du préfet de Haute-Garonne concernant la DUP du tronçon Matabiau St Jory dont les délais sont beaucoup plus courts, ce qui pose un problème de liaison avec la DUP de la LGV (les délais partent de la même date, le lancement le 8 octobre des trois EUP avec celle de St Médard-Bordeaux).
- Et pour les associations il est impératif d'obtenir la réponse de la SNCF au refus des commissaires. Il a été donné au gouvernement le 15 juillet.
Jean-Paul Damaggio