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La compensation ça n’existe pas
La compensation ça n’existe pas

En quatorze ans de lutte contre la LGV j’ai beaucoup appris et pour aujourd’hui je retiens un mot : compensation. Au cours de la première enquête d’utilité publique nous avions pu rencontrer des commissaires enquêteurs authentiques qui ont accepté de donner la parole aux opposants. Deux réunions avaient été prévues et à notre demande ils ont accepté de passer à cinq. Pour saisir la différence, notons que si pour la dernière EUP d’AFNT il y a eu une réunion publique, pour AFSB il n’y en a eu AUCUNE ! Or nous l’avons vérifié, les réunions publiques furent une dure épreuve pour RFF (à l’époque nous n’avions pas SNCF réseaux). Et pour la dernière réunion à Bressols face à une salle archi pleine d’opposants (peut-être 400) ce fut génial. Le maire de Bressols présidait et malgré cette réunion il n’hésita pas ensuite à écrire noir sur blanc que tout le monde voulait la LGV ! Les représentants de RFF étaient manifestement fatigués des épreuves subies car ils pouvaient constater qu’aucun des élus promoteurs du projet n’étaient venus les appuyer !

Bref à un moment, ils ont prononcé une fois de plus le mot compensation et, à ce moment là je trouvais ce mot « gentil », mais derrière moi Joseph Bonotto n’a pas pu se retenir et s’est exclamé avec force, jetant un froid dans la salle : « les compensations ça n’existe pas ! ». Et il avait raison. Devant le TA j’ai à nouveau entendu à foison le mot compensation : pour un arbre abattu SNCF réseaux en plante trois et ils s’en occupent pendant six ans ! C’est ça que je trouvais « gentil » mais qui n’est qu’une embrouille. SNCF réseaux peut très bien planter trois arbres, sans en couper aucun ! SNCF Réseaux coupe un arbre centenaire et il plante trois arbustes. Joseph Bonotto était un agriculteur et en plus de la LGV il était face aux expropriations pour la création autour de la future gare, d’une Technopole. La terre gagnée par le bitume ne peut pas être compensée puisqu’elle est détruite à jamais. D’ailleurs nous le vérifions avec AFNT la compensation est difficile car s’il est facile d’exproprier il n’est pas simple de trouver des terrains « libres ». La compensation ça n’existe pas puisque sur les terrains de remplacement on n’y fera plus le blé que l’on faisait pour prendre exemple.

Oui mais alors les promoteurs de projets disent qu’à ce moment là on ne peut plus rien faire ! Puisque rien ne compense un arbre coupé on ne peut plus les couper sauf s’ils sont malades. Si vous avez une forêt où on coupe un arbre exploitable pour en replanter aussitôt un autre, là c’est la vie même et non une compensation. Donc la question n’est pas la rustine compensatoire mais le point crucial : le projet vaut-il la peine ? Refuser l’idée de compensation c’est pour en revenir à l’essentiel : l’utilité publique d’un projet.

Une maison détruite, le plus souvent ce n’est pas simplement une maison mais une immense histoire. Pour ceux qui achèvent la dite histoire, l’expropriation est une chance, mais pas pour les autres, et les autorités, après avoir brandi le drapeau de la compensation, s’activent surtout pour diviser ceux qui veulent être expropriés et ceux qui ne le veulent pas !

Cette LGV est un projet d’un autre âge, voilà le point final.

J-P Damaggio

P.S. Le hasard a voulu que, autour des luttes totalement différentes, je croise un membre de la famille Bonotto vivant à Aurillac. Et ici je veux rendre hommage aux piliers de la lutte qui sont décédés comme Joseph Bonotto (décédée le 18-4-2021) : Parick Puech (décédée le 15-8-2022), Franck Thesmar (décédée le 31-12-2021) et une amie de Caussade pour TEG dont le Brigitte Ducloz (décédée le 10-10-2016).

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